CHICKEN DIAMOND - THE NIGHT HAS A THOUSAND EYES (2016)
Quatrième album "officiel" en cinq ans (le bonhomme a également sorti quelques CD-R à ses débuts) pour notre one man band favori. Et à chaque fois cette question, cette anxiété, va-t-il malgré une formule éprouvée parvenir encore et toujours à nous enthousiasmer ?
Et bien pour la déception, faudra repasser, cela ne sera pas encore pour cette fois.
On retrouve sur ce The Night Has A Thousand Eyes (titre d'un film de 1948 dont le thème est devenu un standard du jazz), la voix puissante et rocailleuse qui fait tout le sel de l’œuvre de Chicken Diamond, mais ce dernier continue de tenter d'autres choses, de s'ouvrir à d'autres sensibilités que ce qui constitue son fonds de commerce habituel.
Ainsi si on retrouve ça et là le même fonds punk blues vénéneux qu'à l'accoutumée ("Cursed Blood" ou "Badlands" plus bas du front dans son exécution mais porté par un riff addictif), le son se fait tour à tour plus garage ou plus métal et chaque piste contient son lot de surprise.
L'ombre des Stooges plane ainsi grandement sur "Speed Demon" mais également "Castle In The Desert" avec son sax très McKay et "Ghost On The Highway" reprise du Gun Club sonne comme un bel hommage (involontaire?) à Motörhead. Le terminal "I Feel So Good" quant à lui lorgne du côté du "The Butcher" de Rose Tattoo, les amateurs apprécieront.
Des titres comme "Slot Machine" et surtout "Body Snatchers" permettent de mesurer le chemin parcouru, notamment dans le chant, ponctué d'éructations, que le Chicken n'a que rarement utilisé préférant, en grand timide, se réfugier derrière les parpaings qu'ils assènent, d'ailleurs toujours avec autant d’à-propos.
On découvre également un Chicken Diamond plus aventureux que jamais sur ce "Slow Wave Sleep" aux légères effluves psyché. Jamais on n'aura connu Chicken Diamond aussi apaisé que sur ce titre. Un titre qui prend son temps mais qui s'impose au final comme un des temps forts de l'album.
Vous l'aurez compris, The Night Has A Thousand Eyes est un excellent disque, une nouvelle pierre à l'édifice, un jalon supplémentaire d'une discographie pour l'instant sans faille.
Pourvu que ça dure !
REBELS OF TIJUANA - #3 (2016)
A bien y regarder cela faisait une paye que l'on avait pas eu de nouvelles des Rebels Of Tijuana. La Bourgeoise leur précédent long format datant en effet de 2012 (un EP Mambo était tout de même sorti en 2013). Alexis Kacimi avait mis à profit ce hiatus pour sortir l'année dernière un très bel album Cookies & Motoriders.
Ce nouvel album partage quelques similitudes dans le son avec son prédécesseur et, sans surprise, le groupe conserve son goût immodéré pour le garage et la pop sixties, ses accointances pour le yéyé et son attrait pour l'ironie sous toutes ses formes.
Si l'ensemble, à première écoute, nous a apparu moins frontal, moins immédiat que La Bourgeoise, il n'en demeure pas moins que ce #3 est un très bon album, éminemment sympathique notamment grâce à son humour et ses rimes que l'on affectionnent..
Les influences gainsbourgiennes de leur précédent opus laissent ici la place à des penchants pour l'oeuvre d'un Dutronc (ou fatalement celle des Playboys) avec lequel ils partagent nombre de points communs.
Et même si on lui préfère La Bourgeoise, question de goût, cet album a pour lui ce qui faisait parfois défaut à ce dernier : une unité de ton qui fait que même dans ses temps un peu moins fort on ne s'ennuie jamais.
Et puis les Rebels ont pour eux cette capacité à pondre de petites merveilles : "Bangs", "Le Marquis du Garage", "Pampa" ou encore "Burt De Roubaix" sont à ajouter aux nombreuses réussites passées du groupe.
Un disque solide qui fera sans doute dire à ses détracteurs que les Rebels Of Tijuana déclinent un peu toujours la même formule. Certes. Mais ils le font bien, et c'est bien là l'essentiel.
TRUMPETS OF CONSCIOUSNESS (2016)
Derrière le nom un peu bizarre de Trumpets of Consciousness (après les portes de la perception, les trompettes de la conscience?) se cache le Lyonnais Thibauld Labey, ex A Songs. Un nom qu'il est urgent de retenir, toutefois, tant ce disque est une réussite. Nous sommes en effet en présence, avec ce premier LP, d'un album qui déborde d'amour pour le folk, la pop et le rock des années 60/70. Malgré son optique délibérément revivaliste, le disque ne bascule jamais dans le copier-collé de plans mille fois écoutés, pas plus qu'il ne s'enferme dans le pastiche. Clair, aéré, lumineux, l'album de Trumpets of Consciousness ne sent jamais le renfermé.
Dès le morceau d'ouverture, "Never Again", on est frappé par la facilité avec laquelle coule la musique et par le sentiment d'aisance qui baigne ce morceau touffu : une première partie voit alterner pop fluide et passage psychédéliques un peu sombres à la Morgan Delt, le second temps sonnant quand à lui plus easy listening.
Thibauld Labey semble avoir un goût pour les chansons aux constructions complexes. Si les vocalises de "Fruits In The Sun" laissent un peu perplexes, il ne faut pas chipoter, car ailleurs les réussites abondent. "The Game", tout d'abord, miniature alambiquée, toujours à deux doigts de sombrer dans l'excès de préciosité et de complication, se rétablit sur le fil, et emporte l'adhésion. "I'm In Love", ensuite, débute en hymne, sur un piano martelé, avant d'évoluer vers une pop classieuse à la Burt Bacharach. Les claviers rétro y sont superbes. Plus loin, avec le très beau "Let Down Let Flow", Labey assume une certaine grandiloquence (« I don't believe in music anymore »), et paie de belle manière son tribut à Big Star.
Le savoir-faire de Trumpets of Consciousness se révèle aussi dans des chansons à la facture plus classiques, à l'impact plus immédiat. "After All" est une réussite de pop enlevée, un morceau qui coule de source. Avec sa belle construction classique, et ses passages d'orgue bien tournés, "My Enemies" a quelque chose d'évident et de familier.
Et quand il s'agit de faire parler la poudre, Labey n'est pas non plus en reste. Sur la superbe "I Know", la tension ne se dément jamais, à la fois attisée et apaisée par des guitares qui évoquent le meilleur Crazy Horse. On passe un très bon moment à l'écoute de ce disque hautement recommandable.
JAROMIL SABOR - III (2016)
Avec une régularité de métronome voici que déboule le troisième album du précieux Jaromil Sabor, après les excellents Marmalade Sculpture (2012) et La Santa Roja (2014).
Précieux comme sa pop faussement lo-fi, comme sa capacité à proposer des mélodies brillantes qui renvoie à Tim Cohen ("Blue Sun").
Précieux comme sa pop faussement lo-fi, comme sa capacité à proposer des mélodies brillantes qui renvoie à Tim Cohen ("Blue Sun").
Magnifiquement introduit par l'instrumental "Aedion", ce III est un condensé de toutes les obsessions de son auteur, un patchwork de ses influences.
Si la plupart des compositions font état de son penchant pour les mélodies léchées ("Until The End Of The World reprise de ses amis de Chiens de Faïence ; "Story Of Lisa"), Jaromil Sabor n'en oublie pas ses premières amours avec quelques saillies garage efficaces qui évoque le pas si lointain passé où il officiait chez Arthur Pym & The Gordons ("Knocked Out Circus" ; "Seagrave Station" ou encore "What I’m Saying").
Au rayon des pistes brillantes comment ne pas évoqué la suite "Becky Was A Carrion Siren" symptomatique de ses ambitions et de son absence de limite ? Une première partie, lente, traversée d'éclairs de banjo, trompettes, claviers, cuivres, la seconde braillarde, guitares en avant.
Deux facettes résumant l'ambivalence et le talent de Jaromil Sabor et expliquant dans une large mesure notre attachement pour les sorties du bonhomme.
Tout juste peut on noter une production certes bien calibrée mais qui donne un côté un peu propret par instant, sans aspérités, mais c'est quelque chose qui est très vite oublié au vu de la qualité des titres proposés ici.
Salut Rawpower,
RépondreSupprimerBravo pour la promotion des artistes francais et des labels comme pop club, mauvaise foi, casbah etc, ils le meritent et parfois il est difficile de se tenir au courants de toutes les sorties, donc surtout continuez quand ca vaut le coups comme pour Ces disques. Les artistes, pop club, geniaux, les rebels, je les ecoutes depuis un moment et j'adore, j'attends juste qu'il y ait un jour une reed de leurs premiers albums en vinyle. Je me suis d'ailleurs procure toute leurs sorties. Pour les deux autres, sympa, mais ca me plait un peu moins.
a+ et bonne continuation !
Cyril