Par manque de vocabulaire, on a un peu tendance à classer ces groupes comme « alternatifs », terme un peu fourre-tout mais qui dénote à la fois l'originalité des groupes qui en ont émergé et le foisonnement musical californien de l'époque.
Un raccourci bien pratique qui va surtout nous permettre d'évoquer différents groupes à la marge et qui n'auraient pu trouver place dans l'un ou l'autre des papiers, sortis ou à sortir.
(retour au plan du dossier)
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1- GUN CLUB, FLESH EATERS, CRAMPS - LA SAINTE TRINITE.
C'est dans un contexte de bouillonnement de la scène punk, qu'émerge au début des années 80 un petit groupe de rockabilly, The Cyclones, et qui très vite prend le nom de Creeping Ritual.
Si la musique du groupe n'a alors que peu retenu l'attention, son line-up, lui, est entré dans l'histoire. En effet, le groupe est monté par Brian Tristan (pas encore appelé Kid Congo Powers) et Jeffrey Lee Pierce. Le groupe, sur les conseils de Keith Morris (Circle Jerks), changent le nom de Creeping Ritual en Gun Club.
Le groupe ouvre très vite et à de nombreuses reprises pour X ou les Blasters en même qu'il affine son style musical.
Néanmoins, le début de carrière est quelque peu chaotique puisque Don Snowden et Brad Dunning, autres membres originels, quittent le groupe, remplacés par Rob Ritter et Terry Graham du groupe The Bags. Dans la foulée, c'est Kid Congo qui quitte le groupe, remplacé par Ward Dotson. Heureusement, cela ne les empêchera pas de mettre en boîte Fire Of Love (1981).
Produit par Tito Larriva (The Plugz puis Tito & The Tarentulas, groupe fétiche du réalisateur Robert Rodriguez) et Chris D (The Flesh Eaters), ce premier album est un concentré de punk and roll bluesy, habité, qui doit autant au punk qu'à Screamin' Jay Hawkins !
John Doe de X clamait à l'envie que Jeffrey Lee Pierce avec le Gun Club avait inventé un nouveau style musical en mélangeant punk et blues. Le moins que l'on puise dire, c'est que ce Fire Of Love répond parfaitement à cette assertion. D'une authenticité rare, mené par un Lee Pierce en mode sorcier voodoo, le Gun Club envoie professions de foi (« Preaching The Blues »), tranches de vie (« She's Like Heroïn To Me ») et hymnes à la pelle (« Sex Beat »), sur un album qui encore aujourd'hui conserve ce charme vénéneux, qui fait du Gun Club l'un des plus grands groupes de l'histoire du rock.
(http://grooveshark.com/#!/album/Fire+Of+Love/275161)
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Le disque sera bien reçu par la presse et se vendra d'ailleurs plutôt bien ce qui leur permet de signer dans la foulée chez Animal records, le label de Chris Stein, guitariste de Blondie (et qui remettra le pied à l'étrier à un Iggy Pop en perdition avec Zombie Birdhouse). A noter que Pearce, avant de fonder le Gun Club, était président du fan club local du groupe de Debbie Harry.
Avec Stein comme producteur, le groupe enregistre à New York Miami (1982), disque d'une plus grande densité, massif et sec à la fois. La voix de Pearce est particulièrement mise en avant, boostant de ce timbre inimitable, des compositions déjà flamboyantes.
« Carry Home » « Like Calling Up Thunder », « Watermelon Man », « Bad Indian » ou « Texas Serenade » sont autant de joyaux, de titres exécutés, et surtout interprétés sur le fil du rasoir, qui auront une influence certaine sur énormément d'artistes (Mark Lanegan par exemple...). Ajoutez à cela une reprise magnifique de « Run Through The Jungle » et un « Mother Earth » qui réveille le spectre de Jim Morrison et vous obtenez un nouveau chef d'œuvre.
(http://grooveshark.com/#!/album/Miami/221709)
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Le groupe change alors de line-up suite au départ de Rob Litter (qui part pour 45Graves) et Terry Graham, et enregistre un troisième album, The Las Vegas Story (1984) sur lequel jouent entre autres Dave Alvin (The Blasters) et Patricia Morrison (The Bags et futur Sisters Of Mercy). L'album constitue un tournant dans le son du groupe, moins punk et plus proche de ce que les américains appelleront alternative country. Il marque surtout le retour au sein du groupe de Kid Congo. Moins essentiel que les précédents, il n'en demeure pas moins un très bon disque, sans doute moins abordable mais qui contient quelques morceaux bouleversants (« The Master Plan » reprise de Pharaon Sanders ; « Moonlight Motel » ou « Walking The Beast ») et fait surtout la démonstration que le Gun Club était un groupe à part et d'une qualité bien supérieure à bon nombre de ses contemporains.
(http://grooveshark.com/#!/album/The+Las+Vegas+Story/840328)
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Le groupe se sépare une première fois. Kid Congo en profite pour rejoindre les Bad Seeds de Nick Cave et Pierce pour enregistrer le malsain (et indispensable) Wildweed. Cet album est la preuve que Pearce avait encore des choses à dire : il y propose certaines de ses plus belles compositions (« Sex Killer » ; « Love & Desperation »).
La suite est moins glorieuse, le groupe se reforme en 1987 et enregistre Mother Juno produit par Robin Guthrie des Cocteau Twins puis plus tardivement Pastoral Hide and Seek (1990) sans jamais retrouver la magie de leurs trois premiers albums. La santé déclinante de Pearce, aggravée par une consommation importante d'opiacées n'ayant rien arrangé. Un Pearce qui décède en 1996, à l'age de 37 ans...
A la croisée des chemins, la musique du Gun Club reste encore aujourd'hui d'une rare puissance.
(http://grooveshark.com/#!/album/Wildweed/2355745)
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Aux côtés du Gun Club, à l'orée des années 80, on retrouve les Flesh Eaters, composé de membres de X et des Blasters, autour d'un autre personnage emblématique, Chris D (aka Chris Desjardins).
Chris D et Jeffrey Lee Pierce ont d'ailleurs joué un rôle tutélaire sur les scènes Cowpunk et Paisley Underground prenant leur essor via le fanzine – alors influent – Slash.
Les Flesh Eaters, groupe à géométrie variable, fut l'un des plus importants de la scène californienne au tout début des années 80's, notamment grâce à la personnalité hors-norme de Chris D, poète et parolier du groupe, à l'écriture racée, parcourue de poésie noire. Le raccorder à la scène punk comme on le constate bien trop souvent, apparaît véritablement réducteur. Car bien qu'ayant un pied dans le punk, musicalement, le groupe se distingue de la plupart de ses contemporains par ses emprunts au free jazz, à la soul voire au glam rock.
Les Flesh Eaters sortent dès 1978 un premier EP homonyme. En 1980, leur premier album No Questions Asked est publié mais il faut attendre 1981 avec A Minute To Pray A Second To Die pour les voir atteindre, à leur sommet artistique, une renommée tant publique que critique. Il faut dire que sur ce disque, Chris D est particulièrement bien entouré : John Doe de X, Dave Alvin des Blasters, Steve Berlin (Los Lobos, The Blasters) dont les parties de saxo illuminent les compositions, Donald Bonebrake aux percussions (batteur de X) et Bill Bateman aux fûts.
A Minute To Pray A Second To Die est un classique. Une œuvre essentielle, qui vaut au groupe, à l'instar Gun Club, une place à part. L'album donne l'impression d'un large shaker dans lequel Chris D et ses sbires auraient balancé en guise d'ingrédients tous les éléments de la musique américaine qui les fascinent. Le résultat, s'il surprend à la première écoute se révèle très vite addictif. Des pistes comme "See You in the Boneyard", "River of Fever", "So Long", "Digging My Grave" ou "Divine Horseman" dévoilent un groupe fascinant et un Chris D, entertainer de talent.
Le groupe enregistra deux autres albums dans la foulée (Forever Came Today en 1982 et A Hard Road To Follow en 1983) sans retrouver la magie de leur pièce maîtresse. Le groupe splittera d'ailleurs dans la foulée, Chris D formant The Divine Horsemen, groupe qui sortira régulièrement des disques et, puisant dans le courant cowpunk naissant, forgera l'alternative country. Time Stand Still (1984) et Devil's River ont leurs amateurs mais la production et le timbre de voix de Julie Christensen rendent l'écoute assez délicate...
(http://grooveshark.com/#!/album/A+Minute+To+Pray+A+Second+To+Die/636823)
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Gun Club... Flesh Eaters... Pour que le tableau soit complet il ne manque que… les Cramps !
Car c'est à cette époque que les Cramps émigrent de New York à Los Angeles, le groupe cherchant dixit Lux Interior "un terreau pour le rock and roll" qu'ils ne trouvaient pas à New York. Finalement, quoi de mieux pour le duo que la ville de Russ Meyer ? D'autant que l'on a tendance à oublier que Poison Ivy et Lux Interior se sont connus à Sacramento avant de rejoindre Akron puis New York. Rejoints par Kid Congo Powers du Gun Club (qui remplace le démissionnaire Bryan Gregory), le groupe entre en studio pour enregistrer le successeur de Songs The Lord Taught Us (produit par Alex Chilton) : le massif Psychedelic Jungle (1981).
La patte de Kid Congo, la production au couteau – signée par le groupe – marque une rupture dans le son du groupe. Ici, tout sonne strident, par l'absence de basse sans doute, mais surtout par des guitares omniprésentes et cisaillantes. Le son tranche avec Songs The Lord Taught Us, plus lourd et voodoo. Une production qui n'est pas sans évoquer le futur Miami du Gun Club.
La patte de Kid Congo, la production au couteau – signée par le groupe – marque une rupture dans le son du groupe. Ici, tout sonne strident, par l'absence de basse sans doute, mais surtout par des guitares omniprésentes et cisaillantes. Le son tranche avec Songs The Lord Taught Us, plus lourd et voodoo. Une production qui n'est pas sans évoquer le futur Miami du Gun Club.
Sur le contenu, ma foi c'est encore une fois irréprochable, les Cramps enchaînant compos originales et reprises avec la même réussite. Des pistes comme « Greenfuz », « Rockin Bones », « Caveman », « Jungle Hop » ou « Don't Eat Stuff On The Sidewalk » (je m'arrête là on pourrait toutes les citer) sont devenues des classiques du psychobilly.
(http://grooveshark.com/#!/album/Psychedelic+Jungle/1452040)
(http://grooveshark.com/#!/album/Psychedelic+Jungle/1452040)
Les Cramps rencontrent alors quelques difficultés suite à des royalties impayées et un procès avec IRS qui les obligent à un repos forcé durant deux ans, jusqu'à Smell Of Female EP live enregistré à New York. Après cet EP, Kid Congo Powers retourne au bercail et réintègre le Gun Club. La même année, le groupe occupe le terrain avec Off The Bone, compilation de leurs premiers enregistrements qui sort au Royaume Uni sur Illegal Records. I.R.S, certainement plus soucieuse de rentabilité que de mettre en avant ses ex-poulains, sortira « sa » version de ces premiers enregistrements sous le titre Bad Music For Bad People (1984).
Quoiqu'il en soit, ceci marque un regain d'activité pour le groupe qui, dans la foulée, grave un morceau pour la BO de Return Of The Living Dead avant de rentrer enfin en studio pour mettre en boîte leur véritable 3ème album, A Date With Elvis. Ce disque marque alors une petite révolution puisqu'une basse, tenue par Poison Ivy s'y fait entendre !
Musicalement, on se rapproche plus que jamais du rockabilly (à la sauce Cramps of course), A Date With Elvis est même dédicacé à la mémoire de Ricky Nelson. « What's Inside a Girl?", « Kizmiaz », « How Far Can Too Far Go? » ou encore « Can Your Pussy Do the Dog? » et « It's Just That Song » reprise de Charlie Feathers sont à ajouter à la longue suite de perles écrites par le groupe.
Paradoxalement, il aura du mal à s'imposer aux Etats-Unis alors qu'il se taille une sacré réputation au Royaume-Uni qui connaît une fièvre psychobilly (les Meteors) et leur permet de jouer régulièrement à l'Hammersmith Odeon.
Cette situation explique sans doute les difficultés que rencontrera le groupe pour enregistrer d'autres albums studios par la suite, puisqu'il faudra attendre quatre ans pour voir les Cramps sortir un successeur à A Date With Elvis !
(http://grooveshark.com/#!/album/A+Date+With+Elvis/295300)
(http://grooveshark.com/#!/album/A+Date+With+Elvis/295300)
A Date With Elvis marque également la fin de la période glorieuse des Cramps (certains puristes la restreigne même aux deux premiers albums). Le groupe continuera à sortir des albums jusqu'en 2003 et on y trouve toujours quelques titres fameux qui raviront les fans.
A noter que l'on a écho d'un groupe nommé The Unknowns, présenté comme des Ventures punkabilly ! Si un lecteur a des infos sur le groupe, nous sommes bien entendu preneurs !
la suite bientôt !
Frank
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la suite bientôt !
Frank
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J'écoutais les Unknowns dans les années 80. Il jouait sur ges guitares Mosrite comme les ventures. Je pense que j'ai été un des premiers français à jouer sur mosrite d'ailleurs. Le chanteur de ce groupe Bruce Joyner a fait quelques trucs après la séparation du groupe. Maintenant il y a sa bio et celle des unknowns sur wikipédia depuis pas très longtemps puisque la dernière fois que j'avais cherché elles n'y étaient pas.
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