En 1982, date de cet enregistrement, Iggy Pop est au plus mal : lâché par sa maison de disques (Arista), ruiné tant financièrement que physiquement parlant, même Bowie ne semble pouvoir rien faire pour sauver son ami... C'est donc un Iggy dos au mur qui se voit proposé par Chris Stein, guitariste de Bowie et boyfriend de Debbie Harry (Blondie) d'enregistrer un album pour son tout nouveau label, Animal Records (et qui signera la même année Miami du Gun Club...).
L'Iguane s'entoure de Rob Duprey guitariste sur ses précédents enregistrements, Clem Burke de Blondie à la batterie et même Chris Stein qui vient mettre la main à la pâte en couchant quelques lignes de basse.
Les conditions d'enregistrement sont bien entendu exécrables : aucun moyen pour un disque sans aucun effort d'arrangement et enregistré sur un simple magnéto 4 pistes. On est loin très loin du clinquant d'un Lust For Life. Les musiciens ne semblent pas aider dans ces conditions mais font de leur mieux .
Le résultat est incroyable, rarement un disque aura sonné aussi "sec" : déguster Zombie Birdhouse c'est comme s'enfiler un whisky au réveil un lendemain de cuite quand on a le palais encore râpeux des abus de la veille...
Sur ce disque extrêmement difficile d'accès, Iggy y livre de brillantes compositions, poignantes, tant on sent le gaillard sur la corde raide comme s'il était conscient que ces chansons sont le meilleur moyen d'obtenir une certaine forme de rédemption après des années d'égarement. Il s'y livre également à toutes les expérimentations, pas forcément des plus réussies, mais qui paradoxalement renforce le caractère nihiliste des compositions : on ne sait si on doit considérer Iggy Pop comme une sorte de crooner pathétique ou un génie au bord de la rupture, sans doute un peu des deux.
Il faut avoir le coeur bien accroché, et ne pas hésiter à se lancer tout entier dans l'écoute de ce Zombie Birdhouse disque qui ne ressemble à rien de connu : l'écoute du perturbant "Life Of Work" devrait en retourner plus d'un, rarement un disque aura pu générer des sentiments aussi contradictoires...
Et que dire du charme vénéneux de "Run Like A Villain", de la ballade déglinguée "Ordinary Bummer", "Angry Hills", "Street Crazies" ou ce "The Villagers" où Iggy semble s'auto-caricaturer.
A la première écoute il y a une chance sur deux pour que votre premier sentiment soit le rejet absolu. Normal, ce disque ne laisse jamais indifférent. On vous conseillera néanmoins d'insister et de laisser une chance à ce disque qui sort des sentiers battus.
Pour la petite histoire (ou la grande selon l'importance que vous accordez à Iggy Pop), ce disque sera une nouvelle fois après les trois précédents, un échec commercial et critique. Mais pour Iggy l'intérêt est ailleurs. Avec ce disque il remontait (doucement) la pente, l'avenir pour une fois s'annonçait un peu plus radieux qu'à l'accoutumée. Dans la foulée Bowie reprendra pour Let's Dance, "China Girl", offrant par contrecoups de jolies royalties à Iggy... La roue avait enfin tournée.
Frank
Tracklisting :
01-Run Like a Villain – 3:00
02-The Villagers – 3:46
03-Angry Hills – 2:55
04-Life of Work – 3:44
05-The Ballad of Cookie McBride – 2:58
06-Ordinary Bummer – 2:40
07-Eat or Be Eaten – 3:14
08-Bulldozer – 2:16
09-Platonic – 2:39
10-The Horse Song – 2:57
11-Watching the News – 4:10
12-Street Crazies – 3:53
En écoute ici :
http://grooveshark.com/#/album/Zombie+Birdhouse/1018321
Vidéos :
Hello man ! L'article est très intéressant, d'autant que personnellement je préfère ce genre d'album d'expérimentations "sincères" à des oeuvres précédentes (et à suivre) plutôt "clinquantes", pour reprendre ton expression. C'est sans doute ma période préférée d'Iggy, les compos sont hallucinantes et Iggy halluciné. L'enregistrement, la prod, les visuels, tout, tout est mal fait sur cet album... mais on s'en branle... c'est GENIAL !
RépondreSupprimerYeah. Jamais entendu, ça me donne furieusement envie de l'écouter. Merci!
RépondreSupprimerMerci ! c'est un de mes disques cultes, je l'écoute certes rarement (il est quand même assez éprouvant) mais de temps à autre il s'impose naturellement sur la platine... et à chaque fois c'est une claque.
RépondreSupprimer"tout est mal fait sur cet album... mais on s'en branle... c'est GENIAL"
Cher Adrian Bang tu as tout résumé !
J'apprécie pas mal (beaucoup même) le boulot d'Iggy sans pour autant connaître cet album. Plutôt échaudé par ses productions plus "faibles" des années 80, je ne m'étais jamais penché sur cet album. Ta critique me donne carrément envie de me le procurer fissa !
RépondreSupprimerJe te remercie (mon banquier moins mais après tout, c'est pas comme si j'en avais quelque chose à foutre de son avis).
Avant tout achat vaut mieux écouter sur le lien grooveshark ! c'est un disque qui ne laisse pas indifférent :-)
RépondreSupprimerD'ailleurs ça doit être pour ça que tu le trouves assez facilement en vinyle en occaz.
Frank
Après plusieurs écoutes, je dois dire que je suis intrigué par cet album. On y retrouve Iggy Pop sans pour autant que ce soit un album qui sonne vraiment comme ses autres productions. A mon avis, la vague post-punk naissante est passée par là et on le sent titillé par des envies d'expérimentations (je lui trouve parfois quelques liens avec l'oeuvre de Lydon dans PIL). Au final, un disque qui m'a accroché, me donnant envie de l'écouter à plusieurs reprises pour mieux le connaître.
RépondreSupprimerMerci à ce site de m'avoir donné envie de l'écouter en tout cas.
Je vois ce que tu veux dire pour le côté post-punk même si je ne sais si cela a eu un impact sur le disque. En fait les conditions d'enregistrements étaient si minimales qu'iggy et sa bande ont du improviser pour un résultat assez hallucinant et qui effectivement ressemble beaucoup à ce que faisait PIL.
SupprimerUn album qui m'a toujours fait kiffer et que je trouve dans la lignée des experimentations berlinoises de ses albums et ceux de Bowie avec leurs synthés so cold, so hypnotic même s'il a été enregistré à NYC.Perso , ma preferée que je mixe parfois en fin de soirée est "the horse song"!
RépondreSupprimerJ'ai découvert les stooges en 77. J'avais 11 ans et j'achetais mes disques aux puces à Marseille. Je suis tombé sur la pochette de raw power. J'ai acheté tout ce qui était sorti avant, j'ai dégoté le kill city en vinyle vert, et j'ai acheté méthodiquement tous les albums jusqu'à Brick by brick. Non seulement j'adore Zombie birdhouse (j'ai probablement été un des premiers français à l'écouter et à l'acheter) mais j'aime aussi soldier et New values. Je ne trouve pas que ce soit des mauvais albums. Après Brick by brick je trouvais ça pas mal, mais la magie était partie. J'ai été content de la reformation des Stooges et attristé des décès des frères Asheton. Mais les albums préliminaires, après et même le dernier Post pop depression : je n'aime pas du tout. J'ai reécouté d'affilé de new values à zombie birdhouse pour être certain que ces derniers albums sont pas bons, et en effet, après écoute de ces 4 vieux albums et particulièrement le génial Zombie birdhouse je confirme. Tant mieux pour Iggy s'il vend bien ses dernières productions, c'est une belle revanche. Au début des années 80 plus personne n'écoutait Iggy, on était une petite poignée de fidèle,je tiens à le rappeler. Personne n'imaginait qu'il deviendrait une légende du rock, les journalistes descendaient ses albums ne l'oublions pas, les mêmes nazes qui aujourd'hui disent "Iggy Pop, oui génial, j'ai toujours été fan". Merci pour ce site que je viens de découvrir
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