2 février 2010

Wheels On Fire - Get Famous (2009)

Que désire vraiment l'amateur de rock and roll old school si ce n'est des albums qui dépôtent, portés par des morceaux alliant concision et flamboyance, énergie débridée et sens de la mélodie, classe et un soupçon de décadence ? Le genre de disque qui dès la première écoute créé une forme de dépendance à tel point que l'on ne peut s'empêcher de réécouter l'album encore et encore jusqu'à l'usure. Ajoutons à cela que l'on a eu peu de disques durant la décennie écoulée pouvant se targuer de rassembler tout à la fois le fan hardcore de rock and roll et le néophyte. Et bien ce Get Famous des Wheels On Fire (1) est de cette trempe. Et dire que l'on a failli passer à côté...

Sorti chez Fat Possum en 2009, ce disque n'a que peu fait parler de lui, sorte de chaînon manquant entre le côté braillard des Black Lips, celui décadent des Richmond Sluts et des influences irréprochables, Rolling Stones (la pochette évoque Some Girls) et Flamin' Groovies (période Teenage Head) en tête.
Dithyrambique? Ca vous paraît douteux ? Il y a une part de vérité, toute chronique étant fatalement subjective, empreint de la personnalité de son auteur. Pourtant on vous recommande chaudement ce brûlot qui ravira les fans des groupes susnommés.

"Midnight School" qui ouvre l'album donne le ton : une rythmique qui cogne, un chanteur qui éructe plus qu'il ne chante, un farfisa à l'honneur et des guitares à la fête. En trois minutes, les Wheels On Fire envoient le meilleur du punk'n roll avant un "Too Stubborn To Fold" qui aurait pu se trouver sur l'album éponyme des Richmond Sluts avec lequel le groupe partage le même goût pour le rock poisseux teinté de glam.
Le groupe enfile ensuite les perles : "I'm Turning Into You" pépite powerpop touchant à la perfection, rendant hommage à la fois aux Stones et à Big Star, ou le boogie de "Can't Get A Line". Mais les influences des Wheels On Fire ne s'arrêtent pas au garage rock comme en atteste la splendide ballade aux accents bluesy "Gallon Of Gin", où ils démontrent une réelle maîtrise du genre. De blues il en est également question sur "Corckscrew Blues" (forcément avec un tel titre...), rappelant une époque bénie où les Stones savaient encore écrire des morceaux, le genre de titre qu'ils produisaient en abondance entre Sticky Fingers et Exile On Main Street.

On aurait pu craindre un essouflement à mi-album après des compositions d'une telle qualité et pourtant c'est le moment que choisit le groupe pour envoyer la sauce, lacher la bride, en expédiant à la suite pas moins de quatre brûlots high energy : le bien nommé "Metal Mandy" garage rock gorgé de farfisa à mi chemin entre The Revellions et le Jim Jones Revue ; un "Three Sisters" stonien ; un "Like A Curse" à faire écouter d'urgence aux fans des Black Lips mais aussi ce "Hit You With A Curse" frénétique sur lequel le groupe s'imprègne du meilleur du rock and roll fifties.
Après ce déferlement le groupe prend l'auditeur à contre-pied avec la ballade "Two Time Loser", qui clôt l'album, et qui bien qu'efficace fait néanmoins pâle figure aux côtés des morceaux susnommés.

S'il on ajoute à tout cela que peu de morceaux dépassent la barre des trois minutes (soit un album de moins de quarante minutes), on se retrouve devant un album proche de la perfection que l'on conseillera à tous les amoureux du rock and roll, à celles et ceux qui ont craqué pour les Richmond Sluts, Living Things, Black Lips, King Khan et autres Jim Jones Revue.

Dans ces conditions, on ne peut s'empêcher de se poser la question suivante : pourquoi ce disque n'a-t-il pas eu le même écho par exemple que celui des Richmond Sluts ou des Strokes en leur temps?
A cela on peut effectivement arguer, en se faisant l'avocat du diable, que le label Fat Possum n'était pas forcément jusque là réputé pour produire des groupes de rock and roll. Soit.
On peut avancer aussi que le groupe est sans doute trop punk pour les fans de classic rock, trop classic rock pour les afficionados du garage-punk. Soit.
Plus surement on peut regretter que ce disque arrive un peu tard pour bénéficier de l'éclairage qu'il mérite, la hype entourant le soi disant "revival du rock" tendant à s'estomper. Soit.
Mais dans ce cas comment expliquer le succès et l'aura des Black Lips? En se fondant uniquement sur la dramaturgie toute rock'n rollienne que met en scène le groupe lors de ses shows? Cela ne serait pas rendre justice au combo.
Non, on a beau chercher on se demande encore comment ce disque a pu passer inaperçu.

Ecoutez le et aidez nous à tirer le groupe de l'ornière.

Frank


(1) on ignore si le nom du groupe a un rapport avec le morceau This Wheel's On Fire de Bob Dylan (repris par The Band, Julie Driscoll et Brian Auger) ou le double album Wheels On Fire de Cream sorti en 1968...

Tracklisting :

1. Midnight School
2. Too Stubborn To Fold
3. I'm Turning Into You
4. Can't Get A Line
5. Gallon Of Gin
6. Corkscrew Blues
7. Metal Mandy
8. Three Sisters
9. Like A Curse
10. Hit You With A Kiss
11. Two Time Loser


Quelques vidéos :



11 commentaires:

  1. Non, ce disque n'était pas passé inaperçu...

    http://disquairepassion.blogspot.com/2009/04/sortis-du-garage.html

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  2. heureusement,car ca faisait un bail que je n'avait pas recu une décharge aussi rock n roll et euphorisante que i'm turning into you!!

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  3. Ma remarque valait surtout pour la presse "institutionnelle" (quoiqu'il y a quelques lignes sur le site des Inrocks). Heureusement que des blogs en ont causé ! Je m'excuse d'ailleurs de ne pas m'être rendu compte que tu en avais causé !
    Pour me faire pardonner je rajouterai ton blog à ma blogroll !

    Je m'insurge un peu de voir à quel point on peut réussir à zapper un tel disque... A la différence par exemple en leur temps des disques des Richmond Sluts et de Jack meatbeat qui ont justement bénéficié d'un éclairage bienvenu.
    Même sur Mojo ou Pitchfork j'ai pas réussi à dégotter une chronique...

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  4. John the revelator3 février 2010 à 22:14

    Merci pour la découverte Frank!

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  5. Pour ma part j'ai pris le Cd tout à fait par hasard dans ma médiathèque, et ça sentait un peu la poussière, peut-être n'est ce pas plus mal. Pas fan de punk ou de garage band en général, je n'est pas été déçu.

    En tout cas il est vrai que rawpower est le seul blog (en tout cas dans les 5ères pages google) à en parler. Je compte bientôt en publier ma propre critique pour remédier à cela
    [un peu d'auto-promotion ca fait pas de mal ;) ].

    Par contre, savez-vous si Metal Mandy est une reprise? Ca ne me paraît pas "authentique" mais j'arrive pas à mettre le doigt dessus.

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  6. Tous les titres présents sur l'album sont des originaux mais je vois ce que tu veux dire pour "Metal Mandy" : faut dire qu' une attaque de farfisa comme ça tu dois en avoir sur tous les albums de garage revival 60's !

    Par contre la suite est moins intéressante, le Cherry Bomb EP est bon mais Liar Liar leur 2e album est assez décevant. Pas mauvais en soit dans une veine pop lo-fi façon Harlem mais ils ont perdu leur gnac et sont moins bons dans l'exercice que la concurrence...

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  7. Je ne connais pas vraiment la concurrence, n'étant pas du tout adepte du garage rock.
    Mais je te fais confiance alors je ne me précipiterai pas vers le 2ème album.
    Mais si ils passent en concert, je crois que j'aurai du mal à ne pas y aller quand même ;)

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  8. je ne trouve pas que "liar liar" soit dans la veine de Harlem
    je trouve ça plus "américain" dans les influences, je pense parfois à Reigning Sound, et puis c'est pas si loin de la bande de Goodnight Loving aussi
    je le trouve plutôt bien ce disque, du genre pas exceptionnel, mais un chouette album

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  9. oui... je dois avouer l'avoir écouté deux fois et assez distraitement, rien n'avait vraiment retenu mon attention. C'est pas mauvais mais rien de transcendant. En tout cas je trouve ce changement de cap dommageable eu égard à la qualité du premier album.

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  10. c'est pourtant proche de l'ep que tu as chroniqué

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  11. Ah oui c'est clair on est dans la même veine. Mais autant l'EP m'avait enthousiasmé (ce qui m'avait convaincu d'acheter Liar Liar) autant l'album m'a refroidi. En fait je pense qu'il manque sur ce disque de grands morceaux comme "i'm turning into you" sur get famous.
    Par contre cette discussion m'a donné envie de le réécouter :-))

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