1 décembre 2008

Giant Sand (le Point Ephémère - 27/11/2008)

Dès que l'on pénètre dans la salle de concert du Point Ephémère, on est frappé par l'auditoire : beaucoup de trentenaires mâles, légèrement moroses... Visiblement, on n'est pas là pour écouter des groupes qui font danser les filles... Dommage ! Mais rien d'étonnant à cela. Giant Sand n'est pas le "groupe" le plus glamour du monde. Fondé circa 1983 par Howe Gelb, le collectif de Tucson a livré près d'une vingtaine de disques assez confidentiels. Ce groupe pivot du rock indépendant américain est pourtant cité en exemple par PJ Harvey, Steve Wynn ou Isobel Campbell. De l'underground chic, donc, un peu excentrique. Giant Sand livre aujourd'hui un nouvel album, ProVISIONS, et assure une tournée.
On a à peine le temps de tremper les lèvres dans une bière que, déjà, Howe Gelb, monte sur scène. Le bonhomme annonce : "these guys come from Denmark. Denmark, Arizona", et laisse la place à The DeSoto Caucus. Les deux Danois (qui se font connaître par leurs seules initiales, AP et TT) nous donnent quatre morceaux de folk-rock bien imprégnés par Neil Young, Lambchop et...Giant Sand. Les deux cowboys scandinaves savent y faire, et délivrent une musique agréable, à défaut d'être nouvelle. Fin de la première partie. Sur la scène, une jeune femme brune grimpe alors sur une chaise, empoigne une guitare, et se lance dans une jolie chanson folk. La belle se nomme Lucie Idlout, parle français, et déclare venir du Nunavut. A ce moment là, on se dit que Howe Gelb a mis au point une sorte de mini-festival assez exotique. Lucie Idlout enchaîne trois autres morceaux, chantés d'une voix puissante, avec une petite pointe d'émotion. Les compositions ne sont pas bouleversantes, certes, mais le moment est agréable. Fin de la deuxième première partie. C'est au tour de Lonna Kelley. Après la brune, la blonde. La jeune femme est accompagnée des deux Danois, et propose un folk onirique, envoûtant le temps du premier morceau, un peu chichiteux pour les deux titres suivants. Fin de la troisième première partie...
Et début des choses, euh, sérieuses ? Pas sûr. Howe Gelb déboule sur scène habillé en sombre costume trois pièces, s'installe à l'orgue et commence à jouer ... "A Whiter Shade Of Pale". Il est accompagné des deux membres de The Desoto Caucus, enrichis par un batteur. Les quatre premiers morceaux laissent circonspects. Howe Gelb semble prendre un malin plaisir à saboter les morceaux par les dissonances qu'il tire de sa guitare. A coup d'effets étranges, et d'accords curieux, le bonhomme désarçonne le public. Mais après cette introduction un peu chaotique, Gelb se calme un peu. Les dérives soniques s'apaisent. Les morceaux, moins violentés, respirent plus librement. Chaque chanson semble prendre un malin plaisir à égarer l'auditeur : un morceau à l'intro country peut fort bien se terminer à coup de riffs dignes de Sonic Youth. Avec astuce, Gelb insère quelques airs connus dans ses chansons (on croit déceler, à un moment donné, une réminiscence de "la Bamba"), pour mieux plonger après dans de mini-maelstroms sonores. C'est avec la classe et la nonchalance d'un gentleman sudiste que Gelb emballe le concert - le leader de Giant Sand, avec sa barbichette et sa moustache, ressemble au personnage joué par Tom Hanks dans Ladykillers. La sortie de la salle de concert plonge dans la stupeur : pas facile de passer sans transition du soleil de Tucson, Arizona, au crachin de l'autome parisien...

Mr.Pop


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